Médecin coordonnateur dans l’Allier et vice-Président de la FFAMCO (Fédération française des associations de médecins coordonnateurs en Ehpad), Jean-Antoine Rosati juge dans l’ensemble satisfaisante la prise en charge des escarres en Ehpad.
Dans quelle mesure les dispositifs médicaux et, plus largement, la technologie interviennent-ils en Ehpad dans la prévention et le soin des Ehpad ?
Dr Jean-Antoine Rosati : De ce que je sais, les établissements sont dans l’ensemble bien équipés et possèdent le matériel adéquat. Ils ont fait un effort en ce sens en investissant et en achetant des matelas anti-escarres. Plus largement, on assiste à une structuration en la matière. Il est par exemple fréquent qu’une infirmière dédiée ou un kinésithérapeute s’occupe de toute la logistique matérielle et recense l’ensemble des DM que possède l’Ehpad afin de pouvoir l’affecter ça et là quand cela est nécessaire. On constate une démarche en ce sens aussi bien dans les Ehpad que dans les hôpitaux d’ailleurs.
Les établissements doivent disposer de plus de matériel tant pour les résidents atteints d’escarres que pour ceux à risque. Les Ehpad sont-ils suffisamment équipés pour cela ?
Dr J-A. R. : Oui. Dans mon département en tout cas, il y a ce qu’il faut. En revanche, il s’agit de matériel de base de classe 1 ou 2 mais pas de matériel de classe 4 très sophistiqué avec de l’électronique ou autre dont le coût est trop élevé puisque le prix de tels dispositifs peut atteindre 5 000 euros. Dans certains Ehpad, il peut y avoir un ou deux matelas de classe 4 mais ils sont exclusivement réservés aux résidents en fin de vie et en soins palliatifs. En revanche, pour ce qui est du petit matériel du type coussin et autres, les Ehpad ont en général tout ce qu’il faut, quelle que soit la gamme.
Les personnels sont-ils suffisamment formés à l’utilisation du matériel dédié au traitement des escarres ?
Dr J-A. R. : Dans le cadre de nos programmes de formation annuels, nous faisons appel à des experts en ergonomie et ce, depuis environ cinq ans. Ils effectuent d’abord un état des lieux de la manière dont les établissements procèdent en matière de mobilisation des résidents et d’utilisation du matériel puis ils délivrent des formations aux aides-soignants et aux infirmiers quasiment au lit du résident. Cette réactualisation régulière des connaissances contribue à tendre vers une qualité accrue et fait que l’ensemble des personnels sait se servir comme il convient des dispositifs médicaux mis à leur disposition.
Avec l’augmentation du nombre de résidents plus âgés et souvent atteints de polypathologies, les escarres sont-elles devenues un problème majeur pour les établissements ?
Dr J-A. R. : Non. Ils ne sont pas un problème dans les Ehpad. D’abord parce que depuis une bonne dizaine d’années, les établissements insistent beaucoup sur la prévention, en particulier en ce qui concerne l’alimentation et la dénutrition. Ensuite, parce que les personnels sont compétents et que le matériel à disposition dans les Ehpad est dans l’ensemble suffisant. C’est pour cela qu’il y a très peu d’escarres en Ehpad. En revanche, ce qui est plus fréquent, c’est que des résidents contractent des escarres lors d’une hospitalisation ou à leur retour de l’hôpital. Dans ces cas-là et selon leur degré d’évolution, les Ehpad parviennent à les prendre en charge. S’il s’agit d’escarres au stade 3 ou 4, les Ehpad demandent à la HAD d’intervenir car elle possède les pansements spéciaux adaptés à ce type de pathologie. Si les escarres nécessitent en outre un matériel pointu de classe 3 ou 4, les Ehpad le louent ponctuellement auprès de leur fournisseur de dispositifs médicaux. Il est en effet fréquent que les contrats de fourniture comportent des clauses offrant cette possibilité.
Les 4 stades d’escarres : une dégradation progressive et parfois irréversible
L’évolution d’une escarre la rend de plus en plus douloureuse et invalidante pour le patient, ce qui complexifie sa prise en charge et requiert un matériel souvent extrêmement pointu.
Stade 1 :Le premier stade est une altération observable d’une peau intacte, liée à la pression et se manifestant par une modification d’une ou de plusieurs des caractéristiques suivantes en comparaison avec la zone corporelle adjacente ou controlatérale : température de la peau (chaleur ou froideur), consistance du tissu (ferme ou molle) et/ou sensibilité (douleur, démangeaisons). Chez les personnes à la peau claire, l’escarre apparaît comme une rougeur persistante localisée alors que chez les personnes à la peau pigmentée, l’escarre peut être d’une teinte rouge, bleue ou violacée persistante.
Stade 2 :Perte d’une partie de l’épaisseur de la peau. Cette perte touche l’épiderme, le derme ou les deux. L’escarre est superficielle et se présente cliniquement comme une abrasion, une phlyctène ou une ulcération peu profonde.
Stade 3 :Perte de toute l’épaisseur de la peau avec altération ou nécrose du tissu sous-cutané. Celle-ci peut s’étendre jusqu’au fascia mais pas au-delà. L’escarre se présente cliniquement comme une ulcération profonde avec ou sans envahissement des tissus environnants.
Stade 4 :Perte de toute l’épaisseur de la peau avec destruction importante des tissus ou atteinte des muscles, des os ou des structures de soutien (par exemple, des tendons, des articulations). Un envahissement et des fistules peuvent être associés au stade IV de l’escarre.
Source : Classification des stades de l’escarre du National pressure ulcer advisory panel (NPUAP ; 1998 ; www.npuap.org).